« Quand une femme réclame sa liberté à un homme, c'est qu'elle est prête à devenir l'esclave d'un autre. Être libre, pour elle, c'est seulement changer de maître. » - Etienne Rey
Voilà un sujet que j’aborde très rarement publiquement : la place de la femme dans la société.
J’ai toujours trouvé ce sujet glissant, car les gens adorent ensuite faire des raccourcis malheureux sur la position des autres et les ranger dans une case bien étriquée et caricaturale.
Alors, pourquoi le faire aujourd’hui ?
L’envie m’est venue en dévorant le roman « La Perle et la Coquille » de Nadia Hashimi. Chaque soir en tournant les pages de l’histoire de ces femmes afghanes, je ne pouvais m’empêcher de voir avec violence le fossé entre la priorité des femmes là-bas privées de liberté et celles vivant dans un monde occidental en perte de repères face au choix illimité qui lui est offert (sexualité, genre, maternité …).
Bacha posh : libre … jusqu’à la puberté !
Grâce à Nadia Hashimi, j’ai pu découvrir un phénomène insoupçonné pour moi: les « Bacha Posh » dont la traduction serait « vêtue comme un garçon ».
Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Eh bien imaginez une société où les femmes dès leur naissance n’auraient aucun droit, pas même celui de se déplacer hors de chez elle sans un chaperon mâle familial pour des raisons religieuses se basant sur des hadiths.
Imaginez ensuite une famille qui n’aurait que des enfants de sexe féminin.
Une honte pour la mère alors méprisée par son mari qui lui vit une humiliation sociale et un drame financier. Car ce ne sont là que des bouches à nourrir n’ayant en plus pas le droit de travailler [rapporter un revenu]. Pour les parents, l’urgence devient alors de les marier le plus tôt possible.
Eh bien pour ce cas particulier, le statut de la « bacha posh » a été imaginé.
Ou comment des jeunes filles littéralement déguisées en garçons peuvent alors vivre comme et au milieu des garçons jusqu’à leur puberté.
Ces fillettes changent alors de prénom, portent les cheveux courts et des pantalons. Et c’est ainsi qu’elles gagnent les droits alloués au sexe masculin : se promener seule dans la rue, accompagner les femmes de leur famille hors du domicile, jouer dehors avec les autres garçons, aller à l’école, travailler, faire les courses pour leur mère, et se trouve dégagé de toutes corvées ménagères.
Donc oui quand la loi religieuse est une entrave à la survie de la famille, on crée une exception surréaliste. Car le plus fort avec ce tabou c’est que tout le monde sait qui est une bacha posh !
Je trouve ça d’autant plus choquant dans une société où l’homosexualité est un crime.
Le phénomène très local, limité à l’Afghanistan et au Pakistan est soutenu par l’idée qu’ « avoir un fils inventé est mieux que de n’en avoir aucun ».
La puberté : un tournant violent !
Oubliez les droits de l’enfant dans ces conditions. Il s’agit juste des droits des garçons.
D’un point de vue psychologique, je n’ose imaginer les séquelles au moment du premier changement d’identité de petite fille à petit garçon. Quelle dichotomie avec d’un côté la violence du changement imposé et de l’autre côté la liberté offerte à l’enfant en comparaison avec ses sœurs -pouvant créer jalousie voire rejet de leur part.
Puis à la puberté, retour à son statut biologique de jeune fille ou plutôt de « chose » puisqu’on va la marier de force dans la foulée à un homme souvent plus âgé et polygame.
Au passage, elle perdra sa liberté, redeviendra un être sexué pour remplir son rôle de génitrice (de mâles de préférence pour l’honneur de son mari), devra se tenir comme une femme (croiser les jambes, baisser la tête et le regard face à un homme) et sera de nouveau soumise à la tenue du foyer … toutes ces choses auxquelles elle n’a pas été préparée et qui lui vaudront souvent des violences faute d’être à la hauteur.
Les « bacha posh » de l’Occident ?
Alors en lisant ces histoires de femmes se battant pour des droits tellement essentiels que la simple liberté de se déplacer, d’étudier et qu’ensuite j’ouvrais les news côté Occident avec par exemple tous les violents débats autour du changement de sexe, de l’éducation à la sexualité dès la maternelle … je m’interrogeais sur ces sociétés à mes yeux toutes deux malades car incapables de protéger l’intégrité de ses jeunes filles.
Alors oui, traitez-moi de « Réac’ » si vous le voulez, mais quand je vois aux USA de jeunes enfants dont les parents engagent un changement d’identité puis de sexe, j’ai mal pour cet adulte en devenir dont le corps est impacté à jamais.
Est-ce le signe d’une société qui n’a plus de réels problèmes vitaux à gérer au quotidien et s’en crée alors de nouveaux ?
Féminisme toxique
Ensuite je pensais à ces femmes privées du droit le plus primaire, celui de disposer de son propre corps.
Et ma révolte contre la manière dont est dévoyé le féminisme en Occident n’en est que plus grande. Certaines féministes que je qualifie de « toxiques » piétinent sans vergogne le combat de nos aînées.
La situation dans le sport en est une parfaite illustration.
Comment une femme peut-elle soutenir, voire promouvoir qu’un homme biologique concoure dans une compétition sportive féminine ?
Des femmes se sont battues pour avoir ce droit de participer à ces compétitions sportives.
Avez-vous déjà oublié Kathrine Switzer qui en 1967 à Boston a bravé les hommes pour simplement courir un marathon, chose alors interdite aux femmes (n’hésitez pas à visionner à ce sujet le documentaire « Free to run »).
Les hommes s’y opposaient au prétexte que cela pourrait « décrocher l’utérus » de la femme, impacter sa fertilité et la masculiniser. Moi la seule chose que ça me décroche quand j’entends ça … c’est la mâchoire. Non, parce que si on veut jouer la carte du danger de la force gravitationnelle, je pose la question : Quid du « décrochage de testicules » pour les hommes ? Et puis pourquoi ne pas arguer le danger mortel avec la légende (parmi d’autres versions) selon laquelle Euclès en 490 av. J-C serait mort d’épuisement à son arrivée à Athènes après sa course depuis Marathon pour informer de la victoire des Grecs ?
Ouvrir les yeux et retrouver le sens des priorités : la liberté !
C’est avec ces 2 idées en tête que je souhaiterais vous inviter à découvrir ce roman, véritable voyage au cœur de la vie ordinaire de femmes qui nous semblent loin autant physiquement que socialement … et pourtant l’Afghanistan est aux portes de la vieille Europe.
Pour aller plus loin :
Un article de CNN sur le phénomène des bacha posh: https://www.cnn.com/2021/09/04/health/afghan-girls-living-as-boys-wellness/index.html